COMMUNIQUE DE PRESSE 06/11/2024 – Réélection de Donald Trump, les droits des femmes en État d’urgence
6 novembre 2024COMMUNIQUE DE PRESSE 08/11/2024 – Google condamné pour son inaction contre la prolifération de vidéos de viols en ligne
12 novembre 2024Revue de presse féministe & internationale du 4 au 8 novembre
IRAN
La résistance d’une étudiante iranienne face à la répression.
Le samedi 2 novembre, Ahoo Daryaei, étudiante en littérature française à l’université Azad de Téhéran, est interpellée par des membres de la force paramilitaire Basij au sujet du port de son hijab. Une violente altercation éclate au sein de l’université au cours de laquelle son hijab et ses vêtements ont été déchirés. En signe de protestation, elle les retire et marche en sous-vêtements sur le campus.
Peu de temps après, ils l’emmènent de force dans une voiture. Elle est ensuite transférée dans un hôpital psychiatrique, une méthode fréquemment utilisée par le régime pour discréditer les actes de résistance des femmes. Le directeur des relations publiques de l’université a déclaré par la suite qu’Ahoo Daryaei souffrait de problèmes de santé mentale.
La journaliste et militante iranienne Masih Alinejad réagit sur X :
« Elle a fait de son corps un acte de protestation, se déshabillant jusqu’à rester en sous-vêtements et marchant à travers le campus, défiant un régime qui contrôle constamment le corps des femmes. Son geste est un rappel puissant de la lutte des femmes iraniennes pour la liberté. Oui, nous utilisons nos corps comme des armes pour résister à un régime qui tue des femmes pour avoir montré leurs cheveux. »
Masih Alinejad alerte également sur le grave danger auquel Ahoo Daryaei est désormais exposée, craignant qu’elle ne soit soumise à des tortures en détention.
En plus d’avoir été battue lors de son arrestation, les informations sur son état de santé et son lieu de détention sont indisponibles. Par ailleurs, Fatemeh Mohajerani, la porte-parole du gouvernement iranien a démenti les informations affirmant que l’étudiante aurait été arrêtée avec violence. L’ambassade d’Iran en France a également réagi en publiant un communiqué affirmant que l’étudiante « souffrait de problèmes familiaux et d’une fragilité psychologique », réitérant ainsi l’argument selon lequel son action n’aurait pas été réalisée en pleine conscience.
Ce geste de résistance rappelle les violences infligées à Mahsa Amini, décédée à la suite d’une arrestation de la police des mœurs en septembre 2022, en raison du port de son hijab jugé inapproprié. Sa mort avait déclenché un mouvement de protestation massif en Iran, « Femmes, Vie, Liberté », mettant en lumière la répression que subissent les femmes et les lourdes conséquences pour celles qui luttent pour leur liberté et leur droit de disposer de leur propre corps.
Amnesty International a appelé à la libération immédiate de Ahoo Daryaei et a exigé qu’elle puisse recevoir la visite de sa famille et de son avocat.
En France, des organisations féministes et des syndicats se sont rassemblés le mardi 5 novembre 2024 à 17h devant l’université de la Sorbonne en soutien à Ahoo Daryaei « face aux abjectes tentatives de récupération politique de la lutte des Iraniennes et des Afghanes en France ».
Pour en savoir plus sur la répression que subissent les Iraniennes deux ans après la mort de Mahsa Amini, consultez notre article.
ETATS-UNIS
Trump, le retour du chaos.
L’élection de Donald Trump pour un second mandat à la présidence américaine a secoué le monde ce mercredi 6 novembre. Sa réelection au dépend de Kamala Harris, a fait ressurgir des politiques alarmantes sur l’avortement, l’immigration, le climat et les droits des minorités. Alors que Trump annonce des réformes radicales, beaucoup s’inquiètent des conséquences pour les droits des femmes.
Voici un tour d’horizon de ces mesures et leur impact potentiel sur les femmes, aux États-Unis et au-delà :
Depuis la révocation de Roe v. Wade en 2022, plus d’une douzaine d’États (Alabama, Arkansas, Idaho, Kentucky, Louisiane, Mississippi, Missouri, Oklahoma, Dakota du Sud, Tennessee, Texas, Virginie-Occidentale, Wisconsin) ont interdit presque tous les avortements. Avec le projet 2025, Trump compte aller encore plus loin en appliquant la loi Comstock de 1873, interdisant l’envoi de matériel lié à l’avortement, notamment des pilules abortives. Si cette loi est interprétée dans toute sa rigueur, même l’équipement médical des cliniques pourrait être banni, rendant l’avortement quasiment impossible sur l’ensemble du territoire américain.
Ces restrictions menacent directement le droit des femmes à disposer de leur corps. Selon l’Institut Guttmacher, environ 25 % des femmes aux États-Unis avortent au moins une fois dans leur vie ; la restriction fédérale de l’accès aux services d’avortement entraînerait des conséquences dévastatrices, en particulier pour les femmes vulnérables et celles résidant dans les États où les lois sont les plus restrictives. La World Health Organization (WHO) rappelle que les restrictions à l’avortement augmentent les risques d’avortements clandestins, entraînant environ 47 000 décès de femmes chaque année dans le monde, une tendance qui pourrait s’aggraver aux États-Unis avec la réélection de Donald Trump.
La présidence Trump marque également un retour brutal du climato-scepticisme. Lors de son premier mandat, Trump a retiré les États-Unis des accords de Paris sur le climat, et considère toujours le changement climatique comme un « Chinese Hoax » (Canular chinois). Lors de sa campagne, Trump a annoncé vouloir renforcer les industries du pétrole, du gaz et du charbon, et a même menacé de fermer l’agence qui mesure les hausses de température (La NOOA). Son second mandat arrive à un moment crucial, alors que les catastrophes naturelles causées par le dérèglement climatique se multiplient et la situation devient de plus en plus urgente.
Pour rappel, les femmes sont parmi les premières victimes des catastrophes climatiques, qui augmentent l’insécurité alimentaire, les migrations forcées et l’instabilité économique dans les régions concernées. La crise climatique exacerbe les inégalités fondées sur le sexe, les femmes étant 14 fois plus susceptibles que les hommes de mourir lors de catastrophes naturelles, selon les Nations unies.
De plus, Trump a promis de lancer la plus grande opération de déportation de l’histoire américaine, allant jusqu’à utiliser les troupes américaines pour renforcer la sécurité frontalière et faire appliquer les lois sur l’immigration. Il s’est également engagé à rétablir et à étendre certaines de ses politiques d’immigration les plus controversées de son premier mandat, y compris l’interdiction de voyage ciblant principalement des pays à majorité musulmane. Ces mesures d’immigration affecteraient durement les femmes migrantes, qui fuient les violences dans leur pays d’origine, réduisant leur accès à la sécurité et à la protection. De plus, les femmes migrantes sont souvent exposées à des violences spécifiques, notamment sexuelles, durant leur parcours migratoire. La politique d’expulsions massives de Trump renforcerait ces risques pour les femmes migrantes, qui se retrouveraient sans aucun soutien juridique.
Lors de son premier mandat, Trump a également interdit aux personnes transgenres de servir dans l’armée. En cas de réélection, il promettait des attaques encore plus agressives contre les droits des LGBTQ+. Des experts juridiques avertissent que l’égalité dans le mariage pourrait également être menacée sous Trump, en particulier s’il a l’opportunité de nommer de nouveaux juges à la Cour suprême. Les femmes LGBTQ+, déjà marginalisées, pourraient perdre des droits durement acquis, tels que l’accès égal aux services de santé et la reconnaissance de leurs unions.
Depuis la mort de George Floyd en 2020 et les manifestations pour la justice raciale, Trump a exprimé son souhait de durcir les lois anti-manifestation. Plusieurs états dirigés par les républicains ont renforcé les lois anti-manifestations depuis 2020, un mouvement encouragé par Trump. Durant sa campagne, il a promis de mettre en place une suppression des protestations et a juré d’impliquer la garde nationale lorsque « l’ordre public » est en danger. La liberté d’expression est cruciale pour les mouvements féministes et pour la visibilité des violences faites aux femmes. La répression des voix dissidentes limiterait durement l’accès à l’information et affaiblirait les efforts pour promouvoir l’égalité des sexes.
Trump a également promis d’affaiblir le Bureau de prévention de la violence par armes à feu, remettant en cause les progrès en matière de sécurité. Or, les femmes sont souvent victimes de violences armées domestiques ; selon le CDC, elles représentent 50 % des victimes d’homicides conjugaux par armes à feu.
La réélection de Trump intensifie également l’instabilité dans un contexte de conflits mondiaux, notamment au Moyen-Orient et en Ukraine. Son soutien renforcé à Israël pourrait permettre à Benjamin Netanyahu de renforcer le contrôle israélien sur la Cisjordanie sans opposition des États-Unis, rendant l’annexion de ce territoire « bien plus active », selon Khaled Elgindy, expert à l’Institut du Moyen-Orient. Les effets de la guerre sont particulièrement éprouvants pour les femmes, qui subissent souvent des violences accrues, notamment sexuelles, dans les zones de conflit.
Le retour de Donald Trump à la présidence marque un tournant inquiétant pour les droits des femmes. Dans un monde déjà confronté à des crises sociales et climatiques aiguës, ses réformes risquent de balayer des décennies de progrès, menaçant directement la sécurité, la santé et l’égalité des femmes, aux États-Unis et au-delà. La situation est grave, et l’impact pourrait être dévastateur.
https://www.guttmacher.org/report/pregnancies-births-abortions-in-united-states-1973-2020
https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/abortion
https://www.nytimes.com/2016/11/19/world/asia/china-trump-climate-change.html
https://press.un.org/fr/2022/sgsm21181.doc.htm
SOUDAN
L’enfer des violences sexuelles en temps de guerre.
Le 15 avril 2023, des affrontements ont éclaté au Soudan entre les Forces armées soudanaises (SAF) et les Forces de soutien rapide (RSF), plongeant le pays dans un conflit où les filles et les femmes sont les premières victimes.
Dans un rapport de septembre 2024, ONU Femmes alerte sur la gravité de la situation et souligne que les violences sexuelles se sont multipliées dans les zones touchées par les combats. Le rapport nous informe que toutes les parties impliquées sont responsables de violations des droits des filles et des femmes, mais la majorité des abus sont attribués à des hommes du RSF ou de leurs forces alliées.
La directrice régionale de l’Initiative stratégique pour les femmes dans la Corne de l’Afrique (SIHA) Hala Al-Karib a déclaré :
« Dès le premier jour de la guerre, les femmes ont été confrontées à des violences sexuelles. Nos corps sont utilisés comme des outils et des armes de guerre. Il est déchirant de voir que des femmes du centre du Soudan en viennent au suicide pour échapper à la douleur insupportable des viols collectifs et de la torture infligés par les milices armées. »
Depuis juin 2024, SIHA rapporte que trois survivantes de viols se sont suicidées, craignant de subir de nouvelles violences de la part des combattants du RSF. Actuellement, l’organisation est en contact avec six femmes qui ont partagé des idées suicidaires, terrifiées à l’idée d’être agressées sexuellement par les RSF.
Le 23 octobre 2024, le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a publié un rapport détaillant les violations des droits humains au Soudan. Les RSF et leurs milices alliées sont responsables de nombreux actes de violence, notamment des agressions sexuelles telles que viols, esclavage sexuel, enlèvements, torture, meurtres et viols en réunion. Depuis le début du conflit, les violences sexuelles sont utilisées comme arme de terreur. Les principales victimes sont des femmes âgées de 17 à 35 ans, mais entre le début du conflit et juillet 2024, le rapport dénombre au moins 400 survivantes âgées de 8 à 75 ans, presque exclusivement des filles et des femmes, ont été recensées.
En septembre 2024, 97 cas de viol ont été signalés, bien que le nombre réel soit probablement bien plus élevé, le viol étant sous-déclaré en raison de la stigmatisation et des obstacles législatifs. Ces obstacles sont aggravés par l’insécurité croissante, les déplacements forcés et l’accès limité aux services de soutien. Par ailleurs, des défenseuses des droits humains, des journalistes et des professionnelles de santé ont également été victimes de violences sexuelles, souvent présentées comme des actes de « punition » pour leurs activités.
Les survivantes de ces violences, lorsqu’elles sont enceintes, ont subi de graves conséquences sur leur santé, telles que des fausses couches et des complications touchant leurs futures grossesses. Certaines ont perdu la vie faute de traitement approprié, tandis que d’autres ont dû subir de longues interventions chirurgicales pour soigner les blessures causées par les agressions. Le conflit a également entraîné une augmentation des grossesses non désirées, particulièrement chez les filles et les femmes non mariées, qui se retrouvent confrontées à un rejet social et à une plus grande vulnérabilité. L’accès aux services d’avortement légal reste extrêmement difficile pour les survivantes de violences sexuelles, en raison des lois restrictives et des barrières administratives.
Le salon du livre féministe Délivrées !
Pour sa troisième édition, le salon Délivrées !, dédié à l’émancipation féminine et à la promotion de la pensée féministe dans la littérature et les arts, investira l’Espace des Blancs Manteaux (Paris 4ème) du vendredi 8 au lundi 11 novembre 2024. Avec un programme riche en rencontres, tables rondes, projections et masterclass, l’événement est ouvert à tous·tes, en accès libre et gratuit.
« Nous souhaitons valoriser la pensée féministe dans la littérature à travers les livres, mais aussi rendre plus visible la place des femmes autrices sans négliger la dimension d’éducation populaire et la dimension intergénérationnelle », explique Carine Delahaie, directrice du salon Délivrées ! et rédactrice en chef de Clara magazine.
Indépendant depuis sa création, Clara magazine est à l’initiative du salon Délivrées !. En tant que journal de la pensée féministe, le magazine explore depuis plus de 30 ans les rapports sociaux entre les femmes et les hommes, offrant une plateforme d’expression pour celles qui ne l’ont pas spontanément, pour celles que l’on réduit au silence et pour celles rendues invisibles.
Fondé comme un espace d’expression libre, le salon rassemble des figures incontournables de la réflexion féministe autour de thématiques fortes, dans une démarche inclusive et pédagogique.
Le salon débutera par une soirée Thelma & Louise le vendredi à 18h, avec la projection du film de Ridley Scott, célébrant l’émancipation féminine. La projection sera suivie d’un débat animé par Catherine Faye et Marine Sanclemente, autrices de À la vie à la mort – Sur la route avec Thelma et Louise (Paulsen, 2024), puis d’un concert.
Tout au long des quatre jours, le salon proposera de nombreuses rencontres et masterclass avec des personnalités inspirantes telles que Giulia Foïs, Rachida Brakni, Élise Thiébaut, Eva Darlan, Chalah Chafik, Camille Froidevaux-Metterie, Christine Bard et Mary-Laine Patou-Matisse. Ces invitées partageront leur parcours et leurs réflexions sur les enjeux féministes actuels.
Les tables rondes aborderont des sujets cruciaux, comme les violences dans le sport, en lien avec les récents mouvements de libération de la parole. Une autre table ronde explorera la mobilisation des femmes dans le cinéma et les arts, en présence d’Édouard Durand, ancien président de la Ciivise, et de créatrices engagées, pour discuter de la puissance de l’expression artistique dans la prise de parole féminine.
La programmation inclura également des projections de documentaires, avec la participation des documentaristes Bouchera Azzouz et Daniel Kupferstein, qui animeront des discussions sur leur démarche et sur le rôle des récits de femmes à travers le documentaire.
Lors de l’édition précédente, le salon avait réuni plus de 40 auteurs et autrices, avec 35 rencontres et tables rondes, attirant environ 2000 participants et participantes !
Dates et horaires :
- Vendredi 8 novembre : 16h – 23h30
- Samedi 9 novembre : 11h – 22h
- Dimanche 10 novembre : 11h – 22h
- Lundi 11 novembre : 11h – 18h
Lieu : Espace des Blancs Manteaux, 48 rue Vieille du Temple, 75004 Paris