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Edition spéciale élection présidentielle états-unienne !
“GENDER GAP” MARQUE
Le fossé entre le vote des hommes et des femmes, ou le « gender gap », atteint des niveaux jamais atteints auparavant dans les sondages pour l’élection du 5 novembre. Donald Trump renforce son appui aux hommes, mais perd de façon exponentielle chez les femmes. A l’opposé, Kamala Harris domine largement le soutien des femmes, bénéficiant d’une avancée d’au moins 15 points dans les intentions de vote féminines, allant jusqu’à 20 points dans certains États.
Aucun groupe n’incarne autant ce « gender gap » que la Génération Z. En effet, chez les Américain·aines né·es après 1996, on remarque des différences de vote marquées en fonction de leur sexe : un sondage de fin août montrait que les jeunes hommes entre 18 et 29 ans préféraient Trump de 13 points, tandis que les jeunes femmes soutenaient Harris avec un avantage de 38 points, soit une différence frappante de 51 points. Cependant, selon Richard Reeves, fondateur de l’American Institute for Boys and Men, le “gender gap” s’explique davantage par un mouvement des jeunes femmes vers la gauche que par un virage des jeunes hommes vers la droite.
Selon Daniel A. Cox, directeur des enquêtes d’opinion à l’American Enterprise Institute, les opinions politiques des jeunes hommes et femmes ont divergé dans les dix dernières années : les jeunes femmes étant devenues de plus en plus libérales, tandis que les jeunes hommes sont de plus en plus favorables au Parti républicain.
Ce qui soulève la question, pourquoi les femmes ont-elles massivement viré du côté démocrate, et les hommes du côté républicain ? Du côté des femmes, nombre d’entre elles ont atteint l’âge adulte dans une société secouée par le mouvement #MeToo, tandis que Donald Trump incarnait une menace directe pour leurs droits. Accusé de comportements sexistes, de viols, et se vantant de pouvoir « attraper les femmes par la chatte », Donald Trump est devenu le chef de file d’une droite misogyne et violente. Trump incarne également un parti qui a progressivement démantelé leurs droits reproductifs, jusqu’à l’annulation du droit à l’avortement au niveau fédéral. Cette hostilité répétée et déclarée, a poussé une génération entière de femmes à s’engager fermement pour défendre leurs libertés fondamentales.
Pour répondre à la question, pourquoi les hommes, eux, ont-ils eu tendance à virer du côté républicain, nous pouvons utiliser la recherche de Claire Cain Miller, qui dans son article The Upshot pour le Times, analyse comment l’évolution des sexes influence le vote. Dans sa recherche, elle a interrogé plusieurs jeunes hommes supportant Donald Trump, révélant que certains hommes se sentent économiquement et socialement “laissés pour compte” alors que de plus en plus de femmes obtiennent des diplômes et deviennent soutien de famille. Ce sentiment de menace face aux changements sociétaux semble pousser certains à soutenir Donald Trump.
En somme, les hommes se tournent de plus en plus vers le républicanisme, en partie parce qu’ils se sentent menacés par la montée en puissance des femmes qui s’émancipent de plus en plus dans la sphère économique. Certains recherchent dans le parti républicain et des figures comme Donald Trump une défense des valeurs de masculinité traditionnelle. Pour eux, c’est une manière de résister à un monde où les femmes progressent.
LA BOITE A OUTIL MASCULINISTE
Donald Trump utilise ce phénomène à son avantage en intervenant dans des podcasts profondément sexistes, tels qu’Impaulsive de Logan Paul, et les streams d’Adin Ross – ce dernier étant associé à Andrew Tate, inculpé pour des accusations graves, notamment de trafic d’êtres humains, de viols et de formation d’une organisation criminelle visant à exploiter sexuellement des femmes. Ces plateformes attirent un public de jeunes hommes qui rejettent le féminisme et l’égalité totale entre les femmes et les hommes.
Cette stratégie de communication n’est pas anodine, elle montre que Donald Trump cible spécifiquement les jeunes hommes de moins de 30 ans, un groupe peu mobilisé électoralement, car ils votent moins fréquemment que leurs aînés. « Les hommes de 18 à 29 ans ne regardent peut-être pas CNN ou Fox News, mais ils suivent des personnalités comme Logan Paul, Adin Ross et Elon Musk », souligne Michael Higgins, professeur de journalisme et de communication à l’université de Strathclyde, dans une interview au HuffPost. Dans ces vidéos, Donald Trump et ses « influenceurs » masculinistes y parlent entre « vrais » hommes, de sport, de femmes, de « locker-room talk » (expression américaine désignant une conversation sexiste, à tendance raciste et homophobe, qui prend place dans un environnement exclusivement masculin et qui a pour sujet les conquêtes sexuelles de ces derniers).
Après la sortie des sondages montrant Kamala Harris en progression et accentuant son avance auprès des électrices, Donald Trump a suscité de vives critiques en repartageant un post qui sous-entend que la candidate aurait gagné en visibilité politique en l’échange d’actes sexuels. Ce commentaire faisait allusion à une relation amoureuse passée entre Kamala Harris avec Willie Brown, l’ancien maire de San Francisco, qui selon lui, aurait propulsé la carrière de Kamala Harris.
De plus, le rassemblement de Donald Trump au Madison Square Garden dimanche a suscité de vives inquiétudes pour diverses raisons, notamment en raison de ses messages ouvertement fascistes et racistes. Comme l’a rapporté le New York Times, cet événement était aussi un véritable “carnaval de misogynie.”
Lors de ce même rassemblement, Grant Cardone, un « business coach » autoproclamé, a dit de la candidate démocrate qu’elle était une « prostituée », affirmant que « ses proxénètes vont détruire notre pays. » Un autre intervenant, ami d’enfance de Donald Trump, a qualifié Harris de « diable » et « d’Antéchrist ». Donald Trump lui, a qualifié Kamala Harris de « shit vice-president » (en français, vice-présidente de merde). Enfin, Tucker Carlson, ex-présentateur de Fox News, a propagé l’insulte fétiche de Donald Trump, la qualifiant de « faible QI », malgré sa brillante carrière de procureure, sénatrice, et actuelle vice-présidente. Le week-end dernier, lors de l’émission The Joe Rogan Experience – un podcast dont l’auditoire est essentiellement masculin – Donald Trump avait déclaré « certaines de ces femmes sont tellement stupides ».
Il ne s’agissait pas de simples remarques spontanées, mais de propos délibérés. Tout cela fait partie de la stratégie électorale de Trump visant aux Etats Unis un nouvel élan masculin. Il sait qu’il perd massivement chez les femmes, alors il s’en prend aux hommes – en particulier, mais pas exclusivement, aux jeunes hommes mécontents qui ont le sentiment qu’on leur a volé leur droit de naissance au pouvoir. Trump leur donne le droit de dire tout ce qu’ils veulent sur les femmes, et sa campagne est une promesse implicite de leur donner le contrôle des femmes, y compris de leur corps.
« Donald Trump dit ouvertement que les hommes devraient avoir plus de pouvoir. Pour un jeune homme vulnérable, c’est un message attirant », précise Michael Higgins.
L’ancien conseiller de Donald Trump à la Maison Blanche, Stephen Miller, s’est lui aussi lancé dans le jeu du mâle alpha. Lors de l’émission de Jesse Watters sur Fox News au début du mois, Stephan Miller a donné des sois-disants conseils de drague, en affirmant que la misogynie est « irrésistible pour les femmes qui, au fond d’elles-mêmes, veulent que ce soit l’homme qui contrôle ».
Donald Trump incarne la définition de la masculinité toxique dans la culture populaire, et exploite ses outils dans sa campagne présidentielle. Mais ceci, peut-être plus encore que ses propos globalement violents à l’encontre de l’ensemble des minorités ; est l’argument final de Donald Trump : Le symbole de la volonté de remettre les femmes à leur place et de restaurer la suprématie blanche et masculine gagnera-t-il mardi ?
https://www.theguardian.com/us-news/article/2024/aug/29/donald-trump-kamala-harris-sexist-post
https://newrepublic.com/article/187419/trumps-promise-young-men-retribution-against-women