Découvrez le podcast « LES ECOUTANTES », pour vous plonger dans le quotidien des écoutantes du CFCV
24 octobre 2024Revue de presse féministe & internationale du 28 octobre au 1 novembre
31 octobre 2024Revue de presse féministe & internationale du 21 au 25 octobre
FRANCE
5 féminicides ont été commis en une semaine en France.
Le 12 octobre 2024, en Corrèze, une femme est décédée sous les coups infligés par son mari, qui a appelé la gendarmerie pour se dénoncer après l’agression. Le 17 octobre, à Momy, près de Pau, un homme a tué sa compagne avec un couteau avant de se suicider, car elle souhaitait le quitter. Leurs deux enfants ont découvert les corps sans vie de leurs parents ainsi qu’une lettre laissée par le père, expliquant qu’il ne pouvait pas vivre sans elle.
Le week-end dernier, entre le 19 et le 20 octobre, trois autres féminicides ont été recensés en France, à Rouen, en Dordogne et à La Réunion, toutes tuées par leur mari ou ex-compagnon. À Rouen, une adolescente de 17 ans a été poignardée à mort par son ancien compagnon, malgré plusieurs plaintes pour violences conjugales. En Dordogne, une femme de 90 ans a été tuée par son mari, qui s’est ensuite suicidé. À La Réunion, une femme de 34 ans a été retrouvée poignardée dans sa voiture, son ex-compagnon gravement blessé à ses côtés, probablement après une tentative de suicide.
« Aujourd’hui, les féminicides interviennent souvent dans les situations de rupture dans les couples. […] Les meurtres se déroulent d’ailleurs souvent au moment où la femme dit non, s’en va, et où l’homme a le sentiment d’une perte de contrôle, associée à la remise en cause de son identité virile…», analyse l’historienne Christelle Taraud.
Entre 2017 et 2023, 833 féminicides conjugaux ont été recensés en France, soit en moyenne un féminicide tous les trois jours. En 2023, 94 féminicides ont été officiellement dénombrés, un chiffre qui a alerté les associations, qui réclament davantage de moyens pour lutter contre les violences faites aux femmes. Selon l’association Nous Toutes, 111 féminicides ont eu lieu depuis le début de l’année 2024.
Le féminicide est l’expression la plus violente du continuum de violence contre les femmes, il s’agit de la destruction d’une femme en lui donnant la mort. Dans ce continuum de violence il y a d’autres expressions de domination de l’homme sur la femme comme le viol qui est également une entreprise de domination patriarcale, sexiste et violente. En 2021, 94 % des affaires de viol ont été classées sans suite, soulignant l’échec des dispositifs actuels à répondre à ce problème social massif. Face à cette situation alarmante, 45 associations, dont la CLEF, ont annoncé le 18 octobre avoir formé une coalition pour mettre fin à l’impunité et protéger les victimes en créant une Loi Intégrale contre les Violences Sexuelles. Cette loi-cadre doit orienter la politique publique afin de relever les défis liés à la prévention, à la détection des violences, au soutien et à la prise en charge des victimes, tout en renforçant la formation des professionnel·les concerné·es et en améliorant le parcours judiciaire. La coalition appelle également à des mesures strictes pour garantir la sanction effective des auteurs de violences, protéger les groupes vulnérables et lutter contre toutes les formes d’exploitation sexuelle.
« Il n’y a pas eu de grande loi MeToo. Plutôt que des mesures parcellaires et éclatées, nous réclamons une loi globale. Comme associations de terrain, nous proposons 130 mesures dans les domaines de la prévention, de l’éducation, la police, la justice, la santé », explique Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des Femmes.
Les associations ont collaboré pour élaborer près de 130 propositions législatives, réglementaires et budgétaires qui seront présentées en détail dans les prochaines semaines.
La création d’une coalition semble d’autant plus nécessaire dans un contexte où le gouvernement a récemment nommé Paul Christophe comme ministre des Solidarités, de l’Autonomie et de l’Égalité entre les femmes et les hommes, et Salima Saa comme secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes ; un déclassement des droits des femmes alors que le patriarcat continue de tuer.
Dans le cadre du projet de loi de finances présenté le 10 octobre, les crédits alloués au programme 137 dédié à l’égalité entre les femmes et les hommes, considérée comme la « grande cause du quinquennat », augmenteront de 10,4 %, passant de 77,4 millions d’euros en 2024 à 85,11 millions. Cependant, cette hausse reste insuffisante face à la hausse des demandes d’accompagnement des victimes de violences, entraînant une réduction du financement par personne aidée pour les associations. La Fondation des Femmes a estimé en 2023 qu’un investissement de 2,6 milliards d’euros minimum par an est nécessaire pour une réponse efficace aux violences patriarcales (page 3 du rapport).
Parallèlement, Salima Saa a annoncé la création d’une cellule d’urgence dédiée à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. Cette cellule qui regroupe une trentaine d’expert·es issus de divers secteurs a pour objectif d’élaborer un plan de bataille. Son action repose sur trois axes : Protéger, Éduquer et Agir. Le « plan de bataille » de la Secrétaire d’Etat avec les recommandations de cette cellule d’urgence seront dévoilés le 25 novembre, à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes.
https://www.noustoutes.org/comprendre-les-chiffres/
INTERNATIONAL
La Global Gag Rule, une menace pour les droits et la santé des femmes.
La Mexico City Policy ou Global Gag Rule (GGR) est une politique étrangère américaine mise en place par Ronald Reagan en 1984 qui interdit aux organisations non gouvernementales (ONG) étrangères qui reçoivent des financements américains de pratiquer des avortements ou de faire de la sensibilisation autour de son accès, même sur leurs fonds propres, sous menace de perdre ces financements américains.
Depuis Reagan, les Présidents se sont succédé et ont soit abrogé la Global Gag Rule, soit l’ont renforcée. Dans ce contexte, les ONG sont vulnérables aux changements politiques qui surviennent aux États-Unis. Elles sont contraintes de se conformer à la politique américaine afin d’obtenir des financements. Si elles choisissent de refuser ces fonds, cela entraîne une réduction significative de la portée de leurs programmes.
Cette règle a pour conséquence la mise en danger de la vie des filles et des femmes avec l’augmentation des grossesses non désirées, du taux de mortalité maternelle et des avortements à risque. Il a, par ailleurs, été prouvé que la conséquence de la Global Gag Rule n’était pas la réduction des taux d’avortement mais plutôt l’augmentation des avortements à risque.
Barack Obama avait abrogé la Global Gag Rule en 2009 mais avec l’arrivée à la Présidence de Donald Trump en 2017, elle a été au contraire renforcée. Dès son deuxième jour en fonction, il a renforcé cette règle en faisant en sorte qu’elle ne s’adresse plus uniquement aux fonds de planification familiale, mais à tous les programmes de santé mondiaux. Cette mesure a de ce fait eu des impacts sur la lutte contre le VIH, puisque ces mêmes centres de santé couvraient la santé reproductive et sexuelle et la lutte contre le VIH (à noter que 50% du financement mondial de la lutte contre le VIH et le sida provient des Etats-Unis).
L’exemple du Népal met en lumière l’impact désastreux des politiques américaines sur la santé des femmes à l’échelle mondiale. L’ONG Voice of Fetus Nepal créée par Soman Rai en 2009 et en partie financée par des organisations américaines diffusent à l’échelle nationale des messages anti-avortement. Soman Rai affirme avoir sensibilisé plus de 30 000 personnes à travers le Népal depuis la création de l’ONG. Son slogan est : « L’avortement est le plus grand génocide de l’histoire du monde ».
Depuis la légalisation de l’avortement au Népal en 2002, le pays a observé une réduction significative de la mortalité maternelle, passant de 539 décès pour 100 000 naissances en 1996 à 151 en 2022. En dépit de l’existence d’environ 1 300 cliniques d’avortement, la désinformation et la stigmatisation persistent, en particulier dans les zones rurales. Soman Rai et ses bénévoles parcourent les villages pour promouvoir leur message anti-avortement, utilisant des poupées fœtales pour illustrer leurs propos, en partie financée par de l’argent états-unien. Soman Rai, a déclaré à ce sujet que si les femmes népalaises ne savent pas que l’avortement est légal, « c’est une bonne nouvelle pour moi ».
L’intervention de Soman Rai se déroule dans un contexte où les professionnel·les de santé spécialisé·es dans la santé des femmes s’inquiètent des conséquences potentielles de la réélection de Donald Trump. Depuis l’introduction de la Global Gag Rule, les administrations du camp Républicain l’ont imposé et endurci, tandis que les Démocrates l’ont annulé, plongeant les organisations de planification familiale comme Marie Stopes International Nepal (MSI Nepal) dans un cycle de financement instable. Tushar Niroula, le directeur de MSI Nepal, souligne les conséquences désastreuses de cette situation :
« Renforcer le système de santé en quatre ans, puis arrêter pendant quatre ans, signifie tout recommencer à zéro ».
La stigmatisation sociale, le manque de sensibilisation et les difficultés d’accès aux services de planification familiale exposent les femmes à des risques graves. Beaucoup se tournent vers des méthodes dangereuses pour avorter. Bien qu’il y ait peu de données récentes, une étude de Crehpa estimait qu’en 2014, près de 60 % des avortements au Népal étaient illégaux.
Le débat autour de la Global Gag Rule reviendra sur le table en cas de second mandat de Trump. Ainsi, sa réélection représente une menace non seulement pour les droits des femmes à l’échelle des États-Unis, mais également à certains pays, à l’instar du Népal.
https://www.opensocietyfoundations.org/explainers/what-global-gag-rule
https://edition.cnn.com/2018/06/08/health/nepal-pro-life-abortion-intl/index.html
FRANCE
L’Assemblée nationale adopte un amendement pour défiscaliser les pensions alimentaires et supprimer l’avantage fiscal des verseurs.
Le 23 octobre 2024, l’Assemblée nationale a voté un amendement visant à modifier le régime fiscal des pensions alimentaires. La députée socialiste Céline Thiébault-Martinez est à l’origine du dépôt de cet amendement, qui a été adopté avec 50 voix pour et 46 voix contre, malgré l’opposition du gouvernement, de la droite et de l’extrême droite.
Le parent qui reçoit une pension alimentaire, généralement la mère, doit l’ajouter à ses revenus imposables, ce qui peut augmenter le montant de ses impôts. En parallèle, le parent qui la verse, en majorité le père, peut déduire une partie de cette pension de ses revenus imposables. L’amendement modifie ce fonctionnement en rendant la pension alimentaire non imposable pour le parent qui la reçoit, tout en supprimant l’avantage fiscal pour le parent qui la verse.
Aujourd’hui, en France, 82 % des familles monoparentales concernent des mères seules. Selon l’Insee, 41 % des enfants de ces familles vivent sous le seuil de pauvreté, une situation exacerbée par la fiscalisation des pensions alimentaires. Ce système accentue la précarité des mères isolées.
Céline Thiébault-Martinez, députée socialiste, qualifie ce vote de « magnifique victoire ». En effet, l’adoption de cet amendement est une victoire pour les familles monoparentales car il allège leur charge financière et rééquilibre la responsabilité financière entre les deux parents. En cas de 49.3, cette disposition pourrait toutefois être supprimée par le gouvernement Barnier.